Un travail pénible
Certains ne cessent de juger leur travail, c’est-à-dire de dénigrer le moyen qu’ils ont CHOISI pour subvenir à leurs besoins et participer à l’entraide : « je suis sous-payé », « je suis exploité », « je ne suis pas reconnu à ma juste valeur », « mon patron est un tyran », etc. En l’espèce, qui se sous-estime, s’exploite, s’esclavage, se tyrannise ? Qui permet que ce genre de rapport puisse avoir lieu ? N’est-ce pas l’ego lui-même qui, par peur d’aller explorer un territoire inconnu, celui où les concepts d’impossibilité, de fatalité, de malchance, d’injustice et de domination n’ont absolument aucune réalité, a choisi de s’enfermer dans le rôle de la victime impuissante et de désigner le responsable de son mal-être à l’extérieur ? La tentation récurrente du « oui, mais… » est forte chez ceux d’entre nous, prompts à rétorquer qu’il y a des pays où l’on peut naître esclave ou presque, des familles où la moins pénible des issues pour une jeune fille est le commerce de son corps et qu’il y a indubitablement des fonctions qui, en l’absence de diplôme, demeurent inaccessibles, et ainsi de suite. C’est, encore une fois, observer la vie depuis le prisme réducteur du mental qui, d’une part, analyse, estime, juge et accorde de la pénibilité en fonction de ses critères subjectifs et, d’autre part, oublie délibérément que ces décors sont la conséquence temporaire de croyances partagées et certainement pas une réalité immuable à laquelle il faille collectivement se résoudre.
Pourquoi autant envisagent leur fonction dans l’humanité comme une corvée, un sacrifice obligé ou un « mal » nécessaire ? Pourquoi les mêmes, bien souvent, estiment que leur rétribution n’est pas à la hauteur de leurs efforts ? Il est à entendre que nous recevons selon la joie qui est nôtre dans l’accomplissement de notre service. Ainsi, quel que soit le montant de son salaire, nul ne peut être satisfait par un « travail » qui, dès son commencement, lui coûte.
Gregory Mutombo